SEJOUR EN MARTINIQUE

LE DIAMANT

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l.png a nuit qui précéda notre journée au Diamant s'était mal passée pour Julie. Elle n'avait pas bien dormi et s'était réveillée avec la migraine. Lorque nous arrivâmes à l'entrée de la ville par l'est, devant ce magnifique panarama, elle dormait à l'arrière de la voiture. Elle avait dormi pendant tout le trajet, avait manqué le bouchon de Dostaly provoqué non pas par l'arrivée dans les bureaux mais par des travaux sur la route. Derrière les panneaux il y a des hommes qui travaillent. C'est partout vrai même à Dostaly.

Elle avait manqué aussi l'embrouille entre François, Aline et Jean-Pierre. A Le François la circulation était fluide ce qui dans cette ville compliquée touchait à la magie pure. Venant du Vauclin l'entrée de l'agglomération se fait par un immense rond-point au milieu duquel une composition géante représentant des esclaves distrait le conducteur et l'empêche de comprendre que, pour prendre la direction de Saint Esprit, il faut rentrer dans la ville et en ressortir aussitôt. Il doit tourner à droite, revenir sur ses traces par une rue parallèle, alors qu'il a regardé la carte avant le départ et qu'il sait que la direction de Saint Esprit est à gauche de Le François. Pas besoin de lire les panneaux pous savoir où aller ! Mais voilà, il eût mieux fait de les lire pour ne pas tomber dedans et s'entendre reprocher qu'il les voit toujours trop tard parce qu'il néglige de porter ses lunettes de myope. Maudite soit la ville de François ! Autant de fois on la traverse, autant de fois on la contourne, autant de fois on s'y perd. C'est un noeud routier invraissemblable que même un vieux marin ne saurait reconnaître.

Bien en forme Julie aurait pu dire que ma photo n'allait pas donner du site le plus connu de la Martinique une représentation exacte. Je ne l'ai pas cadrée sur le fameux rocher. J'en profiterais donc pour commenter le paysage d'une autre façon. Ce qui fait la beauté d'une baie c'est d'abord la courbe. Il suffit même, dans bien des endroits qu'une côte soit incurvée pour attirer les regards et donner envie d'une villégiature. Mais ce qui ajoute encore à ces effets, c'est la présence d'une petite montagne à l'une des extrémités de la plage. Elle souligne, elle ferme sans obstruer, elle offre au paysage un subtil encadrement, une somptueuse mise en valeur.
Ainsi fait le Morne Larcher au Diamant.

Le Diamant en Martinique est une ville. Mais où est elle sur cette vue de la plage ? Disparue comme Saint Pierre sous quelque cataclysme ? Non, bien au contraire, la ville est blottie dans le paysage. On la devine mieux sur la première photo où elle s'est faite discrète comme tolérée au bord de la baie pour mieux l'habiter, respectueuse de son charme et n'ayant plus jamais la mauvaise idée de s'étendre.

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Quelle riche idée d'avoir nommé ce caillou sur la mer "Le Diamant" !
Et comme est belle sa prolongation vers la ville à qui fut donné le même nom !
Les hommes ont investi le rocher à une période de leur histoire pour répondre à la nature l'ayant placé là, sur cette mer, dans cette baie comme pour donner au lieu une mission particulière. C'était en 1804, les anglais y installèrent une garnison de 200 hommes pour surveiller la côte et renforcer le blocus de la Martinique. Jusqu'à 175 m au dessus de la mer, ils montèrent leurs canons depuis les navires. Une opération à haut risque et pleine d'acrobaties ! Ces maudits anglais eurent même l'outrecuidance de rebaptiser le rocher : HMS Diamond Rock comme si il fût devenu un enième navire de leur armada. Les français ne pouvant le tolérer le prirent à l'abordage et les en extirpèrent après huit mois d'empoignade. Bien fait !
Julie encore endormie ne connut pas tout de suite ce fait historique. Il ne l'eût pas vraiment distraite de son pensum du moment : l'apprentissage des verbes irréguliers anglais. Pour occuper les trajets en voiture que nous faisions chaque matin sa mamie les lui faisait réciter: To become, became, became; to go, went, gone etc... Certains lui posèrent beaucoup de difficultés. To buy, baught, baught, par exemple, n'est jamais bien entré dans sa mémoire. Elle pourra être lâchée dans Carnaby street sans dépenser un penny ! Pour l'aider je lui fit remarquer que la langue anglaise, bien qu'elle soit impitoyable pour les écoliers français avec l'irrégularité de ses verbes, avait sur notre vocabulaire latin quelques avantages appréciables et quelle avait tout intérêt à s'y intéresser de près. Je suggérais à Julie de changer anticonstitutionnellement 90 % des mots français en ayant garde qu'aucun d'eux ne dépasse 3 lettres et qu'aucun d'eux ne soit déjà présent dans la langue de Sakespeare, même si certains disent qu'il fût italien. Pour manger je proposais ite. Pour crayon les anglais ont pen, nous pourrions avoir nep .( Faire des anagrames n'est pas parler anglais. ) Pour pied les anglais ont foot, nous, nous avons pied; je propose d'enlever le e : pid. Nous ne ressemblons pas aux anglais, pourtant, comme eux, nous en avons deux. Ils disent feet malignement, sans ajouter une lettre. Je n'en ajouterais pas non plus et remplacerais le i par le u pour le pluriel. Tenir bon sur ses deux pieds s'écrirait alors : Ten bon sur ses deu pud. Aucun mot ne comporte plus de trois lettes. Quelle simplification ! Messieurs les académiciens au travail ! Au lieu de piquer son ph au nénuphar, au lieu de jeter aux orties quelques circonflexes, soyez audacieux, inventez des mots plus courts. Nous avons déjà lit pour lit et pot pour pot, c'est un commencement...
Avec votre travail et de bons bateaux, la France reprendra la mer à l'Angleterre, elle imposera sur tout le globe sa nouvelle langue. Même les chinois qui parlent plus chinois qu'anglais s'y mettrons. En mangeant du rosbeef la grenouille se vengera de Nelson et de Wellington.
Je ne suis pas sûr que Julie ait bien compris où je voulais l'entraîner. Alors, une fois rétablie, ses quinquets bien ouverts et sa migraine envolée, elle se jeta dans la mer des Caraïbes, oublia les anglais sur leur caillou, leur conjugaison impossible et les champs lexicaux spécialisés de son grand-père.

Et dire que là haut furent montés de lourds canons !
...En 1804 !

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Un aperçu de la ville du Diamant...quand même !

Sur la plage se tenait un petit marché couvert. Elles s'y ruèrent. Il est vrai qu'il y en a peu en Martinique, sauf celui de Fort de France qui paraît-il est magnifique. Mais Fort de France c'est la ville, elle nous faisait peur.
Entre le marché et la mer, un restaurant presque les pieds dans l'eau. Il n'en fallait pas plus pour nous satisfaire.

Anse Cafard, justement là où il faut venir quand il nous tient. Ce n'était pas notre cas et nous n'y fîmes qu'une halte photo.

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Julie, veux-tu te mettre devant les statues des esclaves pour la photo ?
- Non, Papy, je ne suis pas une esclave, je suis une fille libre.
- Mais si Julie, tu es l'esclave des verbes irréguliers inventés par ces maudits anglais. Tant que tu ne les sauras pas tous, tu ne seras pas libre. Tiens, par exemple, comment dis-tu acheter ?
- Euh, euh...attends...
- Non, Julie, aucun verbe anglais ne commence par euh, euh...attends....
- Zut, zut, zut, je ne les saurai jamais.
- Tu vois, tu t'en approches. Allez, mets toi là à côté du premier esclave en béton armé et prends ton regard cap 110°.

Pour toi, Julie, j'ai restitué au Diamant tous les éléments de sa splendeur.

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Et pour que tu penses à autre chose qu'aux verbes anglais, je te propose un nouveau jeu idiot.
Connais tu la tortue turque ?
- Non, c'est qui ?
- C'est une tortue qui vit en Turquie
- Ah ! comme le cheval allemand qui vit en Allemagne alors ?
- Je vois que tu as compris. A toi d'en chercher d'autres.
- Le dauphin de Finlande, dit Mamie. Il y a aussi le mérou de Roumanie, trouva Julie
- et la vipère du Pérou et l'alezan de Zambie,
- et le chat d'Iran, ajouta Mamie qui n'avait pas vraiment compris la règle.
- Mais non, Mamie, ça ne marche pas !
- Alors le crocodile d'Oléron.
- C'est limite, mais on l'accepte.
- Crocodile de la Martinique, repris Julie qui aimait remettre les situations dans le contexte.
etc, etc...
Idiot, certes, mais efficace pour passer le temps sur la route du retour.

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